10ᵉ ATRN à Cape Town : l’Afrique au centre des discussions fiscales
Après une cérémonie d’ouverture marquée par l’optimisme et la détermination, le 10ᵉ Congrès annuel du Réseau Africain de Recherche en Fiscalité (ATRN) est entré dans le vif du sujet. Tout au long de la première journée, les sessions ont donné le ton : il ne s’agit plus seulement de débattre, mais de repenser la fiscalité africaine face à deux urgences majeures, la révolution numérique et la transition climatique.
Dès la première session, intitulée « Décennie de perspicacité, avenir de l’influence », l’ambiance s’est voulue résolument prospective. Pour le professeur Edward Kieswetter, Commissaire sud-africain des impôts, « l’Afrique ne doit plus attendre que d’autres écrivent son récit fiscal. C’est à nous de définir les règles qui répondent à nos réalités ». Un appel auquel a fait écho Mary Baine, Secrétaire exécutive de l’ATAF, rappelant que la connaissance accumulée au cours de la dernière décennie devait désormais se transformer en influence concrète. Les intervenants ont insisté sur trois priorités : bâtir des systèmes de données intelligents et une infrastructure numérique solide, renforcer les partenariats entre gouvernements, universités et groupes de réflexion, et surtout investir dans la jeunesse africaine par le mentorat et la recherche rigoureuse. « Sans données, nous naviguons à l’aveugle. Sans jeunes chercheurs
nous n’avons pas d’avenir », a résumé un participant, donnant le ton d’une session tournée vers l’action.



La deuxième session a transporté le débat sur un terrain plus sensible encore : celui de la fiscalité environnementale. Autour du thème « La politique fiscale dans un monde conscient du climat », les experts ont confronté leurs analyses sur la taxe carbone sud-africaine et sur l’imminent mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (CBAM) de l’Union européenne. Comment concilier croissance économique et engagement écologique ? La question a divisé, mais des pistes communes se sont dégagées : commencer par un prix du carbone bas, puis l’augmenter progressivement en recyclant les revenus vers la transition ; coordonner les politiques fiscales au niveau régional pour éviter que chaque pays ne se retrouve isolé face aux nouvelles barrières commerciales ; et mobiliser le secteur privé ainsi que les bailleurs internationaux, car les budgets publics ne suffiront pas. « Si nous restons passifs, nous serons les perdants d’un jeu que d’autres écrivent pour nous », a prévenu un expert, en référence au CBAM européen.
À l’issue de cette première journée, un message s’impose comme un fil rouge : l’avenir fiscal de l’Afrique se jouera dans sa capacité à investir dans ses données, dans ses talents et dans une collaboration plus étroite entre ses institutions et ses partenaires. L’ATAF, qui célèbre cette année dix ans de dialogue fiscal africain à travers l’ATRN, apparaît comme l’un des catalyseurs essentiels de cette dynamique. Plus qu’un espace de réflexion, le congrès s’affirme comme une plateforme où se dessinent les choix stratégiques de demain.
Le 10ᵉ Congrès de l’ATRN se poursuit à Cape Town jusqu’au 18 septembre. Mais déjà, les débats du premier jour tracent une voie claire : entre numérique et climat, l’Afrique n’a plus le luxe d’attendre. Elle doit s’approprier son avenir fiscal et le faire résonner sur la scène mondiale.
José Baiyuambo