Quand l’Afrique rend son verdict contre le FMI et la Banque mondiale : La justice économique plébiscitée par les peuples
Pour la première fois sur le sol africain, une Commission d’enquête populaire s’est réunie pour examiner les responsabilités du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale dans la crise de la dette qui étouffe le continent depuis des décennies.
Les 19 et 20 juin 2025 à Lilongwe (Malawi), la Commission d’enquête des peuples africains sur l’endettement et les politiques du FMI et de la Banque mondiale, initiative historique portée par l’AFRODAD (Forum et Réseau African sur la dette et le development) a rassemblé organisations citoyennes, universitaires, juristes, parlementaires et victimes de plus de 15 pays africains.
Face à l’aggravation des inégalités, aux coupes budgétaires brutales et à la hausse de l’endettement extérieur, cette Commission avait pour mission de donner la parole aux peuples, documenter les violations subies, et proposer une alternative fondée sur : Justice et souveraineté.
Le constat est sans appel : le FMI et la Banque mondiale ont conçu et entretenu un système de domination financière perpétuant l’héritage colonial.
« Ces institutions ne sont pas neutres. Elles sont les architectes d’un ordre économique injuste qui a sacrifié les droits sociaux des Africains au nom de la stabilité macroéconomique », souligne le rapport final.
La Commission rappelle qu’en 2024, plus de 28 pays africains** subissaient des programmes du FMI imposant :
- Le gel des salaires publics,
- La suppression des subventions sur les biens essentiels,
- L’augmentation de la TVA sur les produits de première nécessité,
- La privatisation des services de santé et d’éducation.
Toutes ces mesures, appliquées sans consultation réelle, ont balayé la souveraineté des parlements et des peuples.
Résultat ?
- Des hôpitaux sans médicaments,
- Des écoles sans enseignants,
- Des femmes exclues du marché du travail pour assumer les tâches de soin non rémunérées,
- Une jeunesse africaine asphyxiée par une dette qu’elle n’a pas contractée.
« L’Afrique perd chaque année 88,6 milliards de dollars en flux financiers illicites, bien plus que l’aide au développement qu’elle reçoit. Loin d’être assistée, l’Afrique est un créancier net du monde», rappelle la Commission.
Le verdict moral et politique issu des travaux dessine une nouvelle voie :
✅ Moratoire immédiat sur le remboursement de la dette des pays en crise, suivi d’un audit citoyen indépendant ;
✅ Annulation des dettes illégitimes et réparations pour les préjudices causés ;
✅ Rejet des politiques d’austérité imposées ;
✅ Création d’un Fonds monétaire africain (transparent, solidaire, intégrant la justice climatique) ;
✅ Contrôle parlementaire des contrats d’endettement avec implication systématique de la société civile ;
✅ Fin des flux financiers illicites et création d’une agence panafricaine de notation.
Ce moment historique s’inscrit dans l’héritage de Thomas Sankara, Kwame Nkrumah et Patrice Lumumba, figures de la souveraineté africaine.
« L’Afrique ne peut se développer sur des fondations de dettes, de conditionnalités néolibérales et de mépris institutionnalisé. Il nous faut un nouveau départ, écrit par nous, pour nous», ont affirmé les organisateurs.
Bien que dépourvue de pouvoir juridictionnel, cette Commission incarne une rupture symbolique majeure : celle d’une Afrique qui n’accepte plus de subir, mais interroge, accuse, propose et agit.
José Baituambo